La colère

La colère revient souvent comme un ressac, au milieu du bon, au milieu des rêveries liées à sa peau et à nos caresses,à son regard intense, à nos fausses luttes dans le lit aussi, quand nous jouions aux catcheuses (alors que nous avons si peu le physique de catcheuses), à nos conversations interminables, comme nous nous livrions, comme nous analysions, trop disait-elle à la fin, mais l'intimité est une chose si rare, qui fait tellement peur à la plupart, pourquoi aurions-nous dû nous priver de ce bien si cher? Ces souvenirs donc, perles éclatantes et douloureuses, disparaissent parfois et vient la colère. La colère, quand je repense à certaines de ses dernières paroles, à ses silences de la fin, à cette attitude qui me semble hautaine à présent quand elle disait qu'elle voulait aimer et que je n'étais pas la bonne, qu'elle ne pouvait pas m'apporter ce dont j'avais besoin et que moi non plus, je ne le pouvais pas, même si elle était incapable de préciser ce dont elle avait besoin. Et puis le reste, que je ne dirais pas ici, qui signait définitivement son manque de considération pour moi, son autocentrage du moment, son incapacité à faire de la place à quelqu'un d'autre. La colère comme une vague, comme une mer, vient petit à petit défaire mes sentiments pour elle, l'envie qu'elle revienne et m'apporte l'assurance que je mérite davantage.